Tous les cinq ans, les communes vaudoises organisent leurs élections générales. Celles de La Vallée les préparent normalement en cette période de fin d’année avec des séances d’information à la population. Mais cette année un peu particulière complique encore un recrutement qui n’est jamais gagné d’avance.
Le canton de Vaud a lancé lundi dernier une campagne baptisée «Pour ma commune» en vue des élections qui auront lieu en mars de l’an prochain. Objectif de cette démarche inédite: appuyer les communes dans leurs recherches de candidats aux législatifs – et même aux exécutifs suivant où. Il serait devenu difficile de trouver des citoyens prêts à s’engager dans les institutions. Stands d’information ou discussions avec la population étaient d’ordinaire au programme de cette période de novembre. Mais elles sont devenues compliquées, voire impossibles pour raisons sanitaires.
D’autres moyens de sensibiliser la population
Au Lieu, la présidente du Conseil communal, Caroline Penseyres avait anticipé en prévoyant une formule conviviale, un apéro du jeudi soir avec diaporama des compétences, fonctionnement et responsabilités d’un législatif communal. Elle a dû renoncer faute d’autorisation de la préfecture. Elle s’est rabattue sur des formules «distancielles», ce mot qui revient désormais sur toutes les lèvres. Concrètement, une annonce dans nos colonnes de la FAVJ laissant son numéro de téléphone à l’intention des citoyens de la commune du Lieu pour expliquer, échanger, espérer convaincre.
Même son de cloche du côté de L’Abbaye. La séance de présentation organisée dans chaque village pour les conseils exécutifs, communaux et municipaux avec la présence de représentants de la Municipalité tombe à l’eau. «Nous procéderons certainement par des annonces dans la presse, tous-ménages et affichage aux piliers publics», explique Luc Berney, président du Conseil communal.
Au niveau cantonal, les services du département des institutions ont eux aussi investi des moyens de communication indirects pour susciter l’intérêt de la population: flyers, affiches et capsules vidéo sont mis à disposition des communes pour les accompagner dans leurs démarches. S’agit-il d’un pis-aller? Pas sûr. Car il apparaît que, Covid ou pas, rien ne remplace le contact personnel à l’heure de recruter des candidats.
Téléphone et bouche-à-oreille
Au Lieu, Caroline Penseyres a été proactive en écrivant aux quarante Conseillers communaux et en leur demandant de lui faire part de leurs intentions de se représenter ou non. Lesdits Conseillers ont été priés de donner réponse cette semaine. «Je me suis dit que cela me laisserait deux mois pour remplacer les partants. Je les ai priés de nous aider à leur trouver un successeur. Certains m’ont répondu qu’ils prospecteraient dans leur village.» De fait, quelques citoyens se seraient déjà annoncés partants pour se porter candidats. «C’est le bouche- à-oreille qui fait son travail», résume Caroline Penseyres, laquelle se dit à la fois confiante et soucieuse. «Les deux dernières législatures déjà, on était à prendre le bottin téléphonique pour repourvoir les dernières places…»
A noter que les communes du Lieu et de L’Abbaye fonctionnent avec une liste d’entente, autant de noms que de places disponibles, plus des viennent-ensuite également élus, afin de pouvoir remplacer au pied levé les Conseillers qui démissionneraient (ou décèderaient) en cours de législature, sans avoir à requérir à un nouveau scrutin de mi-mandat. Tel n’est pas le cas dans la commune du Chenit, laquelle fonctionne avec des groupes politiques et selon le système proportionnel. Dans cette dernière, la responsabilité de retrouver des candidats n’est pas du ressort de la présidence du Conseil communal, mais des chefs de groupe.
Le Chenit et ses groupes politiques
«Convaincre, c’est un métier.» Tel est le constat, plein de réalisme, de Stéphane Reymond. Ce dernier préside le groupe UDI, lequel détient la majorité au Conseil communal du Chenit. C’est sa deuxième législature où il endosse la responsabilité de trouver des candidats pour repourvoir la copieuse liste de son groupe: trente-trois Conseillers communaux, plus cinq municipaux et les viennent-ensuite, dont il est connu que ceux-ci ont de bonnes chances d’être assermentés en cours de législature à cause des fameux départs. De fait, Stéphane Reymond et ses pairs «recruteurs», dont les cinq municipaux issus de son groupe, sont à pied- d’œuvre… depuis quatre mois déjà. En cause, la taille de l’UDI et une dizaine de Conseillers qui ne se représentent pas. «Nous avons établi une liste de “papables” et les avons contactés un par un. On va y arriver, mais on doit y mettre toute notre énergie», souffle Stéphane Reymond.
La situation se présente différemment pour le deuxième groupe en importance, Socialistes et alliés (20 élus actuellement). «Cela fait trois semaines que nous avons dépassé notre quota actuel. Notre stand à la foire nous a amenés quelques personnes», confie Jean-Luc Lecoultre, chef de groupe. A noter le renfort des Verts, lesquels présenteront un candidat à la municipalité. Le groupe sera renommé pour l’occasion «Alliance roses-verts» Sérénité également chez Force 3 (sept élus), troisième et cadet des groupes politiques au Conseil communal du Chenit. «Nous n’avons pas de départ annoncé. Nous commençons seulement à compléter notre liste. Nous avons encore un bon mois pour la finaliser», confie Michel Vullioud. En 2017, la formation opposée à l’influence partisane et aux mots d’ordres avait présenté une liste à quinze noms.
Un exercice civique intéressant et indispensable
Interrogé sur l’évolution de la recherche de candidats, Stéphane Reymond pointe une plus grande difficulté à en trouver. «Les gens s’investissent moins, comme dans les sociétés villageoises ou sportives. Le bénévolat est devenu une denrée rare. Or les Conseils communaux sont essentiels à notre fonctionnement démocratique!» Et de citer la fusion des communes comme exemple. Stéphane Reymond a été l’un des trois motionnaires pour l’étude de fusion en qualité de Conseiller communal. «On a un rôle super important, de force de proposition!», plaide-t-il.
«La chose publique intéresse moins qu’à l’époque, alors que cela touche à des choses pratiques de notre quotidien, le ramassage d’ordures, les routes ou autres. Les citoyens imaginent trop vite que c’est lointain… ou acquis!», déplore Caroline Penseyres.
Celle qui est également doyenne Chez- le-Maître observe aussi chez ses élèves une connaissance du fonctionnement de nos institutions en net recul. En fait partie une méconnaissance de la répartition des rôles entre communes, cantons et Confédération. Ici, une objection est parfois invoquée ou en- tendue: le canton et l’intercommunale décideraient de tout et il ne resterait aux Conseils communaux que la portion congrue. «On a perdu une partie de notre pouvoir civique, c’est vrai et des fois, les municipalités aimeraient avoir des projets plus attractifs que des budgets, mais l’exercice civique reste intéressant et peu chronophage à notre niveau. Aux citoyens qui voudraient voir la “muni” s’engager pour telle ou telle cause, je leur déclare: “Venez au Conseil communal, les propositions sont bienvenues”.» Jean-Luc Lecoultre relève, pour finir, la sérénité non-partisane dans laquelle travaillent les commissions et même un regain d’intérêt pour la gestion des affaires publiques chez les Conseillers qui s’engagent.
Rappel
Le dépôt des listes pour les élections communales et des fractions de commune est fixé au 18 janvier, avec un premier tour le 7 mars 2021. Au niveau communal, les étrangers au bénéfice d’un permis B ou C peuvent élire et être élu. Au Chenit, les citoyens peuvent se faire élire en tant qu’indépendants mais la voie royale reste d’intégrer un des trois groupes politiques. Dans les deux autres communes, contacter le bureau en cas d’intérêt.